Troisième et dernier volet de notre entretien avec Sébastien Mahé. L’entraineur des U19 nous explique dans ce volet comment il opère dans la gestion de son groupe notamment au niveau de la motivation tout au long de la saison, à la mi-temps…etc c’est l’occasion aussi d’évoquer ses meilleurs souvenirs et bien entendu son avenir avec la question du passage aux équipes seniors.
Paroles d’entraineur Sébastien Mahé
As-tu des leaders sur le terrain ? Comment tu fonctionnes avec eux ?
Oui bien sûr ! Dans chaque groupe il y a des meneurs. Dans mon groupe j’ai deux types de leaders: Des leaders techniques qui ont un temps d’avance sur les autres joueurs dans leur progression. Leur contact est bénéfique pour le groupe. Mais surtout des leaders dans le vestiaire. Ce sont les joueurs qui ont du caractère, qui vont porter le groupe sur leurs épaules dans les mauvais jours pour s’effacer le jour où tout va bien. Il y en a peu, chaque génération en possède un ou deux tout au plus. L’idéal serait d’en avoir un dans chaque ligne mais c’est une denrée rare.
Je leur donne beaucoup de responsabilités. Je pratique un coaching plutôt participatif. Je leur expose mes réflexions avant de prendre des décisions. Souvent ils adhèrent mais parfois non alors je change mon fusil d’épaule et nous trouvons une solution ensemble, un compromis idéal pour l’équipe. Ce type de joueur a toujours une implication maximale et une mâturité supérieure par rapport à ses équipiers. Par contre, il faut parfois les brider car ils peuvent avoir tendance à prendre leur rôle trop à coeur et peuvent s’enflammer dans leurs idées ou leurs propos.
Comment parviens-tu à garder un groupe mobilisé en sachant que chaque joueur à sa personnalité, c’est quelque chose que tu fais naturellement ou que tu remets sans cesse en cause ?
Chaque joueur a son caractère et certains sont plus difficiles à gérer que d’autres. Après 5 ans de vie commune on peut penser que ça se fait tout seul mais en fait absolument pas ! Il faut toujours renforcer les liens entre les membres du groupe. On se voit énormément en dehors du foot. On va régulièrement au laser, au soccer, faire un tennis…
Je dois toutefois rester vigilant et éviter d’octroyer un statut à certains joueurs ce qui peut être fait inconsciemment. Il faut que chaque joueur ressente l’égalité et la justice dans les paroles du coach et dans ses choix. En ce sens, nous avons des règles bien spécifiques. J’ai la chance d’avoir un groupe déterminé qui vit football 7 jours sur 7, la gestion des egos s’en trouve facilité.
J’essaie de cristalliser le groupe autour d’objectifs communs. Ces objectifs peuvent être à court terme (match du week-end), à moyen (parcours en coupe) ou à long terme (jouer une montée ou un maintien). Ces objectifs sont à rappeler sans cesse et doivent permettre d’orienter le travail des joueurs ou de les recadrer si le besoin se fait sentir. Ensuite, dans mes choix, je ne me concentre pas une une équipe type de 11 joueurs. J’élargis le groupe et le champ des possibilités. De ce fait, il faut que 16 à 18 joueurs se sentent concernés par ces objectifs car la saison est longue et si les joueurs ont le sentiment de servir de faire valoir ou de joueur de complément on en tire pas grand chose.
Dans ma tâche, je reçois une aide inestimable de mes deux accolytes: Claude Kerneur et Jacky Héno. Je ne me sens jamais seul avec eux et l’état d’esprit que dégage le groupe c’est le leur. Ils sont le ciment de l’équipe et s’occupent de tout pour que les joueurs et moi-même puissions nous consacrer à l’aspect technique.
Que fais-tu lors des périodes de doutes de ton équipe ou d’un joueur, sur quoi t’appuies-tu pour traverser ce passage à vide ?
J’ai la chance d’avoir toujours eu à gérer des groupes très solides mentalement. Le groupe que j’ai actuellement ne doute de rien. En 5 ans, je n’ai que peu de souvenirs de deux défaites d’affilée et aucun de série plus longue. Par contre, c’est arrivé d’avoir des joueurs dans le trou sur des courtes périodes. Les jeunes passent rapidement du tout au rien. Exceptionnel un samedi, transparent les deux suivants… Ceci est le résultat d’un manque de confiance en soi, mais plus les prestations ternes s’enchaînent plus le moral chute. L’éducateur doit vite remettre son poulain en selle. Il faut provoquer le dialogue, expliquer au joueur ce qui ne va pas, écouter son ressenti, parfois s’assurer qu’il n’a pas de contrariétés extérieures. Il faut l’encourager tout le temps, ne ressortir que le positif et surtout ne pas diminuer son temps de jeu. Si le joueur n’émerge pas, il ne faut pas hésiter à le descendre de groupe le temps d’un match. Il y a un fossé entre la DH et la PH. Un joueur de DH en perte de confiance va tout de même survoler un match de PH dans la majeure partie des cas. Sa remontée en équipe A va le valoriser et en général le joueur enchaîne parfaitement par la suite. Après, je ne suis pas convaincu que ça puisse se passer ainsi partout. Mais dans la catégorie U19 à Ménimur ce n’est pas très compliqué à gérer, le joueur a la confiance de son staff technique et de ses coéquipiers ce qui fait qu’il ne tergiverse pas longtemps et sort rapidement du creux.
Et à la mi-temps ?
Le discours a la mi-temps doit être tempéré en toutes circonstances. J’évite d’être dithyrambique dans mes propos lorsque l’équipe s’est montrée à son avantage lors du premier temps de jeu. Par contre, je n’hésite pas à mettre un taquet lorsqu’on est hors sujet mais il n’y a pas de colère dans mon intonation. J’essaie de les vexer pour qu’ils repartent regonflés à bloc. 15 minutes c’est très court, il faut bien choisir ses paroles et être clair dans les consignes tactiques de la seconde période. Il y a toujours des adaptations tactiques à fournir après avoir observé l’adversaire 45 minutes. Les objectifs changent selon le score et la physionomie du match. C’est un véritable jeu d’échec et en général c’est la seconde mi-temps qui est déterminante dans le gain ou la perte du match. Par contre, il ne faut pas assommer les joueurs car c’est un temps de récupération indispensable. De même, il ne faut pas insister sur les erreurs individuelles et au contraire encourager les joueurs un peu fragiles sur la première période. La confiance est la clé de tous les succès. Ce moment de pause peut changer un match, dans un sens ou dans l’autre. Ces quinze minutes ne sont pas anodines et leur gestion est primordiale.
Quel est ton meilleur souvenir en tant qu’éducateur en jeune ?
Je suis obligé d’en choisir trois. Deux avec les JV d’Auray, le troisième avec Ménimur.
Le premier est en 2003 avec les moins de 15 ans à Auray. Nous avions participé au challenge Wanadoo à Lorient contre l’ES Ploemel. Nous avions marqué 9 buts sur 10 tirs. Cela nous avait permis de nous qualifier pour la finale nationale à Bordeaux. Les matchs se sont déroulés au Haillan. En poule nous éliminons Le Mans, Strasbourg et Lille. En quarts nous battons le PSG avant d’étriller Toulouse en demi finale. La finale se jouait à Lescure à la mi-temps de Bordeaux-Lille. Nous avions perdu d’un but contre Montpellier mais la journée restera gravée dans nos mémoires.
Le deuxième est la saison 2003-2004. Je suis monté avec mon groupe de moins 15 ans en moins de 18 ans. Avec le réglement des trois années de 18 ans j’ai eu le privilège d’avoir mes deux frères dans la même équipe. Une saison parfaite sur tous les plans dont nous avons tous gardé la nostalgie.
Le dernier est tout récent car il s’est déroulé le 10 février à Kérizac lors d’un 32ème de finale de coupe Gambardella. Nous avons eu le privilège d’affronter une référence parmi les centres de formation français: la Berrichonne de Châteauroux. La journée fut parfaite: repas très familial, remise des équipements par les sponsors (Crédit Agricole et Intersport), super match devant une sacrée galerie, buffet… Cette aventure a été exceptionnelle. La déception de la défaite est encore vive mais le souvenir restera grand par rapport à ce que mes garçons ont montré tout au long des 90 minutes.
Quel joueur t’a le plus marqué ?
Dans quelques années je citerai des éléments de mon groupe actuel car il y a des joueurs exceptionnels mais pour l’instant je ne peux pas me permettre d’en parler. Je vais donc donner deux joueurs qui ont tout gagné en jeunes (7 ans de foot à 11, 7 montées).
Le premier Alexandre Sagot joue actuellement en CFA 2 à La Montagne. En jeunes, certaines saisons, je l’ai vu planter plus de 100 buts. Sur ses trois années de 19 ans, il a marqué 140 buts en championnat. C’est un joueur de très haut niveau qui jouera plus haut dans le futur. Il a toutes les qualités de l’attaquant moderne et possède un vrai mental de vainqueur. Certains clubs de National ou de CFA seraient bien inspirés de se renseigner un peu plutôt que d’aller chercher des « truites » à l’autre bout de la France.
Le second Julien Mahé joue depuis deux saisons en DSR à l’AS Ménimur. Il a été exceptionnel en jeunes en inscrivant de nombreux buts et délivrant de nombreux cadeaux pour son compère de l’attaque. Je n’ai jamais revu un joueur aussi fort sur coup franc. Il n’a pas toujours fait les bons choix dans sa carrière sénior et n’évolue qu’en DSR mais c’est un joueur en devenir avec un potentiel technique exceptionnel. Ses plus belles années de séniors sont encore devant lui.
Tu arrives en fin de cycle avec ce groupe puisqu’après ce sont les seniors, est-ce que tu vas continuer à suivre ce groupe ou repartir avec un nouveau ?
A ce jour je ne sais pas de quoi sera fait mon futur footballistique. Je me concentre à 200% sur les objectifs à court terme: préparer les 94 à intégrer la DSR, préparer les 95 à évoluer en 19 DH. Quoi qu’il arrive il y aura la fin de quelque chose de fort en fin de saison. Nous sommes conscients que les choses vont changer pour nous tous. Je l’ai deja vécu dans le passé à Auray. C’est compliqué de repartir après de telles aventures, il faut avoir une grosse motivation et un super challenge à relever. Continuer avec un groupe de jeunes ? Passer dans le monde séniors ? La réflexion sera difficile car d’un côté je sais que mon monde est celui des jeunes et je m’y sens très bien. Mais d’un autre je suis curieux, j’ai plein de projets et d’envies pour la suite de mon activité et cette progression tend vers un challenge sénior. On verra bien quelles seront les opportunités en fin de saison. Maintenant, il est encore très tôt pour penser à cela. Donc je vais m’atteler à ma tâche et mener à bien mes missions. Je gérerai les aspects personnels plus tard, à ce jour c’est complétement secondaire.
Une réponse
Monsieur,
J’apprécie à sa juste valeur l’interview de l’entraîneur
Mahé et j’aimerais en savoir davantage sur d’autres
questions concernant le football qui est ma passion
en tant analyste et journaliste.