Suite de cette interview qui vous a passionné dans sa première partie (ICI). Patrick Chanceaulme nous donne des pistes pour améliorer sa communication et faire passer ses messages auprès de son groupe avec notamment l’exploration de la situation de conflit. J’espère que vous apprécierez cet entretien comme je l’ai grandement apprécié.
Comment mieux faire passer ses messages ?
Il y a là aussi des techniques à connaître si l’on veut que les messages passent. Il y a au moins 4 règles d’or à connaître et à pratiquer. Cela nécessite un entraînement. J’en parle également dans mon livre :
- Exprimer des faits, sans accommoder, sans juger, sans accuser, sans généraliser…
- Exprimer ses émotions, en les assumant (« je suis déçu » et non « tu m’as déçu ») et sans en être dépendant (exemple : exprimer sa colère sans se mettre en colère)
- Exprimer un besoin (préférer « j’ai besoin de calme » à « tu es pénible »)
- Exprimer des demandes claires, précises, réalistes et en formulation positive
Ces techniques de communication « inspirée » créent du lien et suscitent la motivation optimum.
Il est dommage que les entraîneurs, dans leur grande majorité, ne les maîtrisent pas, pratiquant le plus souvent, sans même le savoir et sans mauvaise intention, ce que l’on appelle la micro-violence verbale, celle qui crée de la distance et démotive les individus.
Que faire en cas de conflits avec un joueur ?
Tout d’abord, avant qu’il y ait conflit, il y a des signes précurseurs. Il convient donc que l’entraîneur soit à l’affût de tous ces petits signes précurseurs d’un début de détérioration des relations. Joachim Low, le sélectionneur de la Manschaft, a confié à une personne le soin de veiller à tous les débuts de détérioration des relations entre joueurs. Il veut avoir des yeux et des oreilles là où il ne peut pas être lui-même. Dès l’apparence des premiers signes de détérioration d’une relation, il est essentiel de pratiquer le(s) entretien(s) de régulation. Si les règles d’or de l’entretien de régulation sont appliquées, dans 99% des cas, la situation s’arrange et la petite étincelle ne se transforme pas en incendie. Si cette phase a été occultée, il est alors grand temps de pratiquer le(s) entretien(s) de gestion de conflits, voire de recadrage, avec les règles d’or qui incombent à ces types d’entretien.
Quelle doit être l’attitude de l’entraîneur en bord de touche pour communiquer ses consignes ?
S’il y a bien un moment où l’entraîneur doit déléguer et s’extraire de l’action, c’est celui du match, celui de la compétition. En effet, l’entraîneur ne peut pas être à la fois sur le banc et sur le terrain, à la place des joueurs. Aussi, je suis toujours surpris de voir certains entraîneurs hurler leurs consignes de manière quasi-permanente depuis le banc de touche. Cela est un aveu d’absence de préparation. Cela signifie que le travail préparatoire n’a pas été effectué et que l’entraîneur n’a pas confiance en ses joueurs. Bien sûr, il peut y avoir, pendant un match, des situations d’urgence qui nécessitent l’intervention (ponctuelle) de l’entraîneur, auprès d’un joueur, de préférence via le capitaine ou celui qui a été préalablement identifié comme devant être le relais de l’entraîneur sur le terrain. Cela dit, la majorité des cas de figure pouvant se présenter doivent avoir été évoqués à l’entraînement et les joueurs doivent savoir s’adapter, sur le terrain, avec parfois quelques échanges entre eux. Les interventions prioritaires de l’entraîneur doivent se situer avant le match et à la mi-temps, pour confirmer, réguler ou réadapter.
La communication est la capacité à s’adapter à chacun ? Et donc l’entraîneur doit-il être celui qui relie les individus(les individualités) entre eux ?
Le devoir premier d’un responsable (d’une équipe sportive comme d’une entreprise) consiste à se remettre en cause a priori. Cela signifie que, avant de s’en prendre aux autres, il doit s’interroger sur ce qu’il a fait (ou pas fait) lui-même, pour que ça marche ou que ça ne marche pas.
Précisément, en terme d’adaptation à ses joueurs, un entraîneur doit régulièrement se poser les questions suivantes, pour chacun de ses joueurs et pour chaque membre de son staff :
- Comment fonctionne-t-il : quelles sont ses préférences cérébrales ? (un rationnel ? un relationnel ? axé sur la réflexion ? plutôt sur l’action ?)… Quel est son mode d’apprentissage ? … Quelle est sa capacité à faire ceci ou cela ? Quel est son niveau de motivation pour faire ceci ou cela ?
- Compte tenu de son mode de fonctionnement, que puis-faire et que dois-je faire pour qu’il donne le meilleur de lui-même, 90% de son potentiel, 100%, 110 %… ?
Ensuite, une fois que chacun est bien dans sa tête et dans son corps, uniquement lorsque chacun est prêt à donner le maximum de lui-même pour le groupe et le projet collectif, alors l’entraîneur peut véhiculer des messages collectifs, qui s’adressent au groupe.
Il est illusoire de croire qu’un entraîneur puisse fabriquer un vrai collectif en s’adressant uniquement, à la cantonade, à tout le monde. Lorsqu’on s’adresse à tous, on s’adresse à personne. La communication est donc une affaire individuelle, avant d’être collective. Pour répondre à votre question et pour relier les individus(individualités) entre eux, l’entraîneur doit d’abord veiller à la motivation et à l’implication individuelle de chacun. Ensuite, bien évidemment, il y a des messages de groupe à privilégier et d’autres qui sont à bannir.
Quels conseils donneriez-vous à un entraîneur qui a envie d’améliorer sa communication ?
Avant de lui donner un conseil, je m’assurerais qu’il a vraiment envie d’en recevoir un (conseil).
Aussi, je me contenterais dans un premier temps de lui demander comment il compte faire pour améliorer sa communication. Le questionnement est en effet une forme d’écoute très puissante qui ‘’oblige’’ l’interlocuteur à devenir force de proposition. En posant ce type de question, on se rend compte dans 90% des cas que les gens ont déjà une(des) idée(s) bien en tête. Or, vous savez pertinemment que lorsque l’idée vient de la personne elle-même, il y a davantage de chances qu’elle soit mise en application.
Cela dit, si un entraîneur me demandait ouvertement un conseil, je lui suggèrerais alors :
- de lire mon livre « Les entraîneurs sont-ils entraînés ? »
- puis de s’entraîner aux techniques de communication « inspirée »
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Une réponse
Bon soir rien adire